Réflexion nocturne sur Marie-Madeleine et la nature du Féminin

Publié le 26 octobre 2025 à 13:38

Cette nuit, j’ai rouvert l’Évangile de Marie-Madeleine.

Je ne sais pas pourquoi. Peut-être parce qu’une part de moi avait besoin de se souvenir. Les mots anciens, effacés, mutilés par le temps, semblaient m’attendre.

Et à mesure que je les lisais, une pensée ancienne est remontée, comme un parfum oublié : une intuition que j’avais eue il y a plus de trente ans, sur la femme, sur sa nature profonde, sur ce lien secret qu’elle entretient avec le divin.

Cette nuit, cette pensée a repris vie. Et avec elle, une évidence, douce et implacable : la femme n’est pas une route secondaire vers Dieu, elle est le chemin lui-même.

La femme n’a pas besoin de chercher le divin, elle le porte. Elle le porte dans son souffle, dans ses cycles, dans sa chair qui crée et transforme, dans cette mystérieuse alchimie entre le visible et l’invisible.

Elle est la matrice du monde, non seulement parce qu’elle enfante, mais parce qu’elle accueille.

Elle sait faire place au mystère, là où l’homme cherche à le comprendre. Elle vit ce que lui tente de nommer. Et c’est peut-être là le drame de notre humanité : avoir laissé le Verbe s’éloigner du ventre, la pensée s’éloigner du cœur.

Depuis trop longtemps, l’homme a voulu saisir le mystère. Et ce qu’il n’a pas pu saisir, il a voulu contrôler.

Alors il a bâti des dogmes. Et dans ces dogmes, il a enfermé la lumière. Il a voulu enseigner Dieu, plutôt que de le respirer. Il a préféré la loi à la vie, la forme à la présence, la peur à la confiance.

Et depuis toujours, l’humanité tourne en rond.Toujours les mêmes guerres, les mêmes orgueils, les mêmes illusions de pouvoir.Une ronde sans fin autour d’un centre oublié : le cœur.

En lisant Marie-Madeleine, j’ai compris qu’elle portait la mémoire de ce centre. Elle n’est pas seulement un personnage de l’histoire sacrée, elle est le symbole vivant de l’âme humaine en voie de réconciliation. Les Évangiles disent : « Jésus chassa d’elle sept démons. » Mais ces démons ne sont pas des entités venues d’ailleurs.

Ils sont les ombres de la conscience, les blessures de la Terre, les nôtres. Ils sont les sept nœuds de l’humanité, les sept chaînes que la peur a forgées au fil du temps.

Le premier démon, c’est la peur : peur de manquer, peur de mourir, peur d’aimer, peur d’être libre, peur d'avoir peur...

Le deuxième, la culpabilité : ce poison subtil qui a fait du corps une honte et du plaisir une faute, culpabilité de la faute originelle..

Le troisième, la colère : le feu de la vie perverti par la douleur et l’injustice.

Le quatrième, le non-amour : le cœur refermé sur lui-même, incapable de donner ou de recevoir.

Le cinquième, le mensonge : celui que l’on se fait à soi-même pour ne pas voir la vérité.

Le sixième, l’illusion : les yeux tournés vers les apparences, oublieux de la présence.

Et le septième, le plus insidieux, l’orgueil spirituel : la croyance qu’on détient la lumière, qu’on la possède, alors qu’elle ne peut qu’être vécue.

Ces sept démons, Marie-Madeleine les a traversés. Non dans la honte, mais dans la conscience. Et c’est pour cela qu’elle a été guérie. Parce qu’elle a tout regardé en face. Parce qu’elle a osé s’aimer jusque dans l’ombre. Parce qu’elle a compris que la lumière n’est pas donnée de l’extérieur, mais qu’elle s’allume en soi, dès qu’on cesse de se fuir.

Les enseignements de Jésus ne sont pas comme un maître qui délivre, mais comme une conscience qui éclaire.

Et ce que Marie a vécu et transmis, elle l’a vécu pour l’humanité tout entière : elle a traversé l’obscurité pour rouvrir le passage entre la matière et l’esprit.

Elle est devenue la lumière du monde nouveau, celle qui ne brille pas par pouvoir, mais par présence, non pas parce que le Christ se tenait devant elle, mais parce qu’il vibrait en elle.

Elle a été la première à comprendre que la résurrection n’est pas un miracle, mais un état. Un passage de la séparation à l’unité, de la peur à l’amour, du mental au cœur. Ce moment où le féminin et le masculin cessent de se craindre pour s’embrasser.

Et alors, j’ai compris autre chose. J’ai compris pourquoi, depuis tant de siècles, le féminin a été réduit, infériorisé, humilié, écarté, traité de sexe faible… On a même fait sortir la femme d'une côte d'Adam pour bien lui faire comprendre qu'elle n'est qu'un "sous-produit de la création…

Le féminin porte un secret. Parce qu’il est le lieu du passage. Parce qu’il n’a pas besoin d’autorisation pour être divin.

Le dogmatisme masculin, qu’il soit religieux, politique ou intellectuel, a toujours tenté d’étouffer ce mystère.

Mais le feu du féminin n’appartient à personne. On peut le nier, le rabaisser, le brûler, le crucifier, il reviendra toujours, sous une autre forme, dans un autre cœur. Et il revient aujourd’hui, plus fort que jamais. Je le vois tous les jours...

Marie-Madeleine n’est pas un souvenir du passé, elle est la mémoire du futur. Elle revient dans la conscience humaine pour rappeler à chacun que la lumière ne se trouve pas dans les temples ni dans les livres, mais dans la chair des vivants.

Elle revient pour rappeler à la femme qu’elle n’a rien à prouver, seulement à se souvenir. Et à l’homme, qu’il n’a rien à conquérir, seulement à s’incliner devant la vie.

L’humanité n’a pas besoin d’un nouveau dogme, ni d’un nouveau sauveur. Elle a besoin d’un retour à la vérité simple et vibrante du cœur. D’un état sans peur. D’une intelligence reliée. D’un amour vivant.

Le "Royaume" n’est pas ailleurs. Il est ici, dans ce souffle, dans ce regard, dans cette conscience qui s’éveille. Il est dans la femme, le chemin. Il est dans l’homme, le pas. Et quand ils marchent ensemble, le monde se souvient enfin qu’il est divin.

Et vous, qui lisez ces mots, qu’entendez-vous en vous de cette réflexion ?

Qu’éveille en vous Marie-Madeleine, cette femme qu’on a voulu taire comme beaucoup d'autres et qui pourtant réapparaît chaque fois que le monde perd son âme ?

Ressentez-vous ce féminin oublié qui murmure au fond de vous, cet appel à l’unité, à la réconciliation du cœur et de la conscience ?

Croyez-vous que l’humanité puisse se guérir sans réhabiliter la femme, non comme image, mais comme principe vivant, comme souffle créateur ?

Et surtout… que faites-vous, chacun, chacune, pour que ce divin oublié se relève en vous ?

Car peut-être que le vrai évangile commence ici, dans la question, dans le silence, dans ce regard intérieur qui ose enfin se poser sur la lumière qu’il porte.

Je ne crois pas au divin tel qu’on me l’a présenté dans mon enfance.

Je n’ai jamais été pratiquant, et les dogmes n’ont jamais su me convaincre.

Mais je crois au divin comme Spinoza le concevait : non comme un être extérieur, mais comme l’essence même de la vie, la substance invisible qui anime toute chose.

Je crois en l’invisible, en la prière comme acte de reliance, en la mémoire ancienne des rituels qui nous relient à ce que nous avons oublié d’aimer.

Je crois que le passé détient encore des fragments de vérité capables d’éclairer notre présent.

Je crois surtout aux humains qu’on a cachés, bannis, effacés, parce qu’ils dérangeaient les certitudes.

Alors ne voyez pas en moi un homme qui sait, mais un homme qui cherche. Un humain qui tente, humblement, de se souvenir.

Giulio Fioravanti Veilleur ... qui se souvient...

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